Obésité : une prise en charge complète et gratuite à la Presqu’île

Coralie Antoniou, infirmière coordinatrice du programme-pilote mené à la Presqu'île par la Direction de la santé (Photo : ACL/LDT).
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D’après la dernière étude menée par la Direction de la santé, l’obésité est une problématique de santé publique qui concerne 40 % de la population en Polynésie française. En hausse localement comme à l’échelle mondiale, cette maladie chronique est source de nombreuses pathologies, telles que l’hypertension, le diabète, l’insuffisance respiratoire, l’arthrose ou encore les troubles hormonaux.

Miser sur l’éducation thérapeutique

C’est dans ce contexte qu’un programme-pilote d’éducation thérapeutique à destination des personnes en situation d’obésité a été lancé début juillet, à l’hôpital de Taravao, à l’intention des patients du sud de Tahiti. “L’éducation thérapeutique du patient est reconnue et répandue : on peut obtenir de bons résultats dans l’amélioration des maladies”, remarque Coralie Antoniou, infirmière coordinatrice de ce projet d’équipe, en association avec une diététicienne, une psychologue et un coach sportif.

“Le programme se déroule en deux phases : on commence par des entretiens individuels pour faire le point, puis on continue par des consultations régulières complétées par des ateliers collectifs d’activité physique adaptée, sur l’équilibre alimentaire et les sensations, dont la satiété, avec des ateliers de cuisine, et sur l’image de soi, la gestion des émotions, et d’éventuels traumatismes à prendre en charge psychologiquement”, poursuit la référente.

8 nouveaux patients intégrés chaque mois

Piloté et financé par la Direction de la santé, le programme est accessible sur ordonnance du médecin traitant à partir de 16 ans pour les personnes dont l’indice de masse corporelle (IMC) est équivalent ou supérieur à 32, correspondant à une obésité modérée à sévère. Actuellement, les patients ont entre 21 et 70 ans. Huit sont actuellement pris en charge, et ils seront 16 le mois prochain. Quinze autres personnes sont déjà sur liste d’attente. “On rentre 8 personnes par mois dans le programme pour atteindre progressivement 50 à 60 patients en simultané”, précise Coralie Antoniou.

Proximité et motivation

Sans surprise, la demande est au rendez-vous pour cette prise en charge complète. “Globalement, les patients sont super intéressés par l’initiative. C’est gratuit pour eux, donc c’est une belle opportunité ! Sur les changements à long terme, il faudra voir au fil du programme. L’objectif, c’est de les aider à changer leurs habitudes de vie en leur donnant les clés pour pouvoir être acteurs de leur prise en charge et de l’amélioration de leur santé. La spécificité de ce programme, c’est aussi que les consultations individuelles sont proposées à domicile, ce qui est souvent arrangeant pour les patients”, souligne l’infirmière.

Un point de vue partagé par la directrice de l’hôpital de Taravao. “C’est un outil supplémentaire dans la prise en charge de l’obésité, dans une démarche de proximité, au plus près des familles, qui mérite d’être développée sur d’autres structures, par la suite”, confirme Marie-Pierre Tefaafana. La Direction de la santé prévoit effectivement de déployer “rapidement” ce programme-pilote à Raiatea, Tubuai et Hiva Oa.

D’une durée de six mois, le suivi des patients sera ponctué d’un bilan intermédiaire à mi-parcours, puis au terme de la prise en charge, reconductible selon le profil de chacun.

Bernard Begliomini, éducateur sportif spécialisé en sport-santé :

Photo : Archive ACL/LDT.

“Des activités physiques adaptées”

“Je propose aux patients des activités physiques adaptées. Dans la première phase du programme, j’ai réalisé les bilans initiaux de condition physique, avec des tests d’endurance, de force, de souplesse et d’équilibre. Cette semaine, on commence les deux séances d’une heure de sport par semaine, en groupes de 10 personnes maximum, avec des exercices de renforcement musculaire et cardio adaptés aux pathologies de chacun. Le but, c’est qu’au bout de six mois, les personnes puissent changer leurs habitudes de vie, notamment en continuant à faire des activités physiques à la maison. À l’issue de chaque séance, ils ont des exercices à faire chez eux pour prolonger les bienfaits du sport. J’ai aussi prévu quelques sorties en extérieur pour leur apprendre à mieux marcher”.

Mignora, 54 ans, patiente de Tautira :

“J’étais à la recherche d’une aide pour améliorer ma santé”

“J’ai découvert ce programme par le biais de mon médecin, qui m’a proposé de m’inscrire. Je suis en surpoids avec au moins 30 kg à perdre, j’ai de la tension et je commence à faire du diabète. Comme tout s’accumule, j’étais à la recherche d’une aide pour améliorer ma santé. Ce n’est pas facile, car je travaille chez moi : je suis artisane et je prépare aussi des plats de ma’a. Il y a toujours quelque chose à grignoter ! La diététicienne et l’infirmière sont déjà passées me voir pour faire un point. On mange sans trop réfléchir, alors que j’ai appris qu’il faut prendre son temps. Franchement, on réapprend à manger ! Et je viens de commencer le sport. Mes enfants me soutiennent : ils essaient de faire des efforts, eux aussi. L’avantage, c’est que les entretiens individuels se font chez moi. Ça permet de rester motivée, parce que ce n’est pas toujours simple pour moi de me déplacer jusqu’à Taravao”.