Cimetière de l’Uranie (1/3) : 14 hectares de mémoire au cœur de Papeete

Alexandre Bernière, le responsable des lieux depuis 2011, à côté d'une des plus anciennes tombes connues, qui date de 1855. (Photo SA)
Alexandre Bernière, le responsable des lieux depuis 2011, à côté d'une des plus anciennes tombes connues, qui date de 1855. (Photo SA)
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Le président de la République, François Hollande, s’était recueilli sur la tombe de Pouvanaa a Oopa. (Photo AFP)

La Dépêche invite ses lecteurs à une immersion profonde en trois volets dans le plus grand cimetière du fenua, le plus connu aussi tant il incarne le souvenir de celles et ceux qui ont fait la gloire du fenua, de 1843 à nos jours : le cimetière de l’Uranie à Papeete. A lire également : “Cimetière de l’Uranie (2-3), 17 000 sépultures et un problème de place” et enfin “Cimetière de l’Uranie (3-3) : tragédies, destinées et célébrités”.

On ne se rend pas au cimetière de l’Uranie par hasard! Cela peut d’abord être pour y pour rejoindre sa dernière demeure, auquel cas c’est une ultime “visite”.… Ou bien, on se déplace à l’Uranie par respect envers les chers disparus dont les tombes et caveaux méritent d’être régulièrement entretenus et fleuris mais au sein de la population, ils sont de moins en moins nombreux à accomplir ce devoir de mémoire…

Un enterrement à l’Uranie en pleine crise Covid à Tahiti. (Suliane Facennec/AFP)

Dernière hypothèse plus rare, il faut l’avouer, l’objectif est de partir à la découverte de ce qui constitue l’un des hauts lieux de la capitale polynésienne. Car en suivant l’unique petite route goudronnée sur près de 2 km entre l’entrée du cimetière et le sixième étage d’où l’on peut contempler une vue magnifique sur le port de Papeete, c’est une véritable page d’histoire de la vie polynésienne, en particulier celle de Tahiti, qui s’offre au visiteur.

La construction de nouveau caveaux dans la partie supérieure du cimetière. (Photo SA)

Alexandre Bernière, le responsable des lieux depuis 2011, a servi de guide à La Dépêche pour la visite du plus grand des cimetières polynésiens. Cet employé de la municipalité a commencé en 1987 “tout au bas de l’échelle”, en qualité de prestataire chargé de l’entretien du site.

Mais à force de curiosité, il s’est en quelque sorte attaché à cette “population de l’ombre” dont les plus grandes familles (les Martin, Millaud, Raoulx, Bréaud, Drollet, Hirshon…) ont fait la gloire du fenua au cours des 150e dernières années.

Un site de 14 hectares

D’un point de vue purement administratif, Alexandre Bernière, à la tête d’une équipe de huit personnes, veille sur le site et gère tout ce qui relève des opérations funéraires et des attributions de concession. “Si tu n’est pas résident de Papeete, il est difficile de reposer à l’Uranie !” prévient-il d’emblée. A quelques exceptions près.

Le nettoyage des tombes, ou même simplement la visite aux disparus, sont des habitudes qui ont tendance à se perdre peu à peu. (Photo SA)

Les tarifs, le directeur du cimetière les connaît par cœur: 85 000 F pour une concession de 1m sur 2,50m à titre perpétuel. Un investissement auquel il faut ajouter des frais d’inhumation de 19 000 F par adulte, 10 000 F pour un enfant, et pratiquement le même montant pour une exhumation.

Les vols de fleurs ont cessé avec la crise Covid 19, selon le directeur du cimetière. (Photo DG)

Car le souci premier du responsable du cimetière de l’Uranie, c’est de rentabiliser au mieux et de faire durer le plus longtemps possible cette propriété de la Ville de Papeete qui s’étend sur une superficie de 14 hectares avec des possibilités d’extension de plus en plus réduites en raison de l’appétit des promoteurs immobiliers. A l’instar de la Villa Stencer, dernière implantation en date, dont une bonne partie des appartements cossus surplombe le 1er étage sans que cette cohabitation un peu atypique ne semble gêner qui que ce soit.

Un corbillard transporte le corps de Cheyenne Brando, la fille de l’acteur américain qui s’est suicidée à Tahiti, suite à une longue dépression après de le décès de son petit ami Dag Drollet en 1990. (Photo AFP)

Il ne faut pas croire pour autant que l’on entre à l’Uranie comme dans un moulin ! Les heures d’ouverture et de fermeture doivent être scrupuleusement respectées, même si Alexandre Bernière en convient: il reste encore des brèches dans le dispositif… Cela a donné lieu par le passé à des vols de fleurs fraîches. De nuit comme de jour, sans vergogne, des personnes peu scrupuleuses se sont adonnées à ces petits larcins. “Pour les revendre probablement”, croit savoir le responsable qui assure par ailleurs que ces incivilités ont pris fin avec la crise de la Covid.

S.A

Le premier étage du cimetière abrite parmi les plus anciennes tombes. (Photo SA)