lundi 23 mars 2015
L’usine de jus de fruits de Moorea confrontée à un problème d’approvisionnement d’ananas
Pour développer la communication du produit, Tahiti Promotion travaille actuellement sur la sortie d’un site Internet Rotui destiné à proposer le jus d’ananas de Moorea par le biais d’un réseau sélectif.
Cette consolidation d’un marché engagée en 2014 s’est donc traduite, début 2015, par une nouvelle commande de “Painapo” d’un volume équivalent à celui précédemment expédié, c’est-à-dire quatre palettes minimum.
Malheureusement, la direction de Jus de fruits de Moorea (JFM) Rotui, représentée par son directeur général Jean-Michel Monot, a été dans l’obligation de répondre qu’elle ne pourrait pas honorer d’autres commandes d’exportation vers le Japon.
Une rupture de livraison du fruit symbole de l’île, sur une période d’au moins quatre mois, est en effet envisagée par la direction de JFM Rotui, entre les mois de mai à juillet, qui est la période de la basse saison de production.
Jean-Michel Monot précise : “Lorsque nous parlons de pur jus pressé d’ananas, donc le Painapo, nous parlons d’une production à base de fruits frais. Pour l’avoir à la vente toute l’année, il faut être livré en fruits frais en continu, c’est ce qui a toujours été le cas. Or, aujourd’hui, je n’ai plus la capacité de m’engager pour une nouvelle production car les quantités livrées de fruits sont devenues irrégulières et surtout insuffisantes…”
Le fournisseur en ananas de l’usine Rotui de la société JFM est la Coopérative de promotion agricole de Moorea (Copam).
Partenaire de l’usine à raison de 16 % du capital, la Copam regroupe une vingtaine de familles d’agriculteurs qui, moyennant un accord préalable avec les responsables de l’usine, a pour obligation de fournir des quantités précises de fruits tout au long de l’année. Les quantités sont toutefois variables selon que l’on se trouve en période de haute ou de basse saison.
Un choix cornélien
En 2014, les quantités livrées à l’usine étaient loin de celle attendues. “Au lieu de 1 600 à 2 000 prévues, 1 250 tonnes ont été livrées à l’usine. Aussi, pour ne pas mettre l’ensemble de nos produits à base d’ananas en rupture, des choix ont été pris pour permettre de répondre à la demande du marché local. Nous avons privilégié la ‘boisson d’ananas’, qui est le produit phare des ventes Rotui sur le marché local aux dépens d’autres gammes de jus à base d’ananas qui ont été revues à la baisse.”
Les jus concernés sont le “multi fruits”, “Tahiti drink”, “Tropical”. La production du “Painapo”, jus destiné à l’exportation vers le Japon, mais aussi vers la Nouvelle-Calédonie et en projet vers la France, a, quant à lui, été tout simplement arrêtée.
“Ces deux derniers mois, nous avons organisé des réunions avec les membres de la Copam pour parler cette problématique. Le manque de 250 tonnes de fruits ne nous a pas permis de produire suffisamment de concentrés pour nos autres produits à base d’ananas”, se désole le directeur général.
“Une perte que l’on est obligé de compenser avec d’autres fruits frais livrés qui auraient dû servir à la fabrication des jus à base de fruits, comme le Painapo, destiné au marché local et à l’exportation.
Notre méthode de fonctionnement depuis des années est la même. Elle consiste à produire du stock de nos jus concentrés en haute saison de production. Le reste du temps (basse saison qui dure environs neuf mois), les fruits livrés sont utilisés pour la fabrication de boissons telles que le Painapo.”
Et Jean-Michel Monot de lancer un avertissement : “À chacun son métier, mais s’il le faut, nous mettrons, nous aussi, la main dans la terre. Et si vraiment on ne trouve personne pour nous livrer comme nous le demandons, eh bien, nous exploiterons ces terres nous-mêmes. Il n’est pas question pour nous de mourir, par contre, il ne faudra pas venir plus tard nous le reprocher…”
De notre correspondant Jeannot Rey
Lire aussi dans La Dépêche de Tahiti ou au feuilletage numérique l’interview de Coco Teraiharoa, ex-président de la Copam (2000 à 2013)
“À chacun son métier”
Pour la direction de JFM, le message est clair : “Il faudrait que les planteurs de la Copam arrêtent de fournir en grande quantité le marcher extérieur, Tahiti en particulier. Cette fuite vers l’extérieur est l’une des causes du manque de quantité suffisante de fruits pour l’usine”. Les planteurs sont en effet tentés vers la vente libre moyennant un prix plus attractif (100 à 120 F le kilo) sur un marché plus aléatoire, plutôt qu’à l’usine malgré un prix d’achat du fruit réévalué à 74 F le kilo en basse saison et
42 F le kilo en haute saison moyennant un contrat d’achat sûr et à long terme.
S’ajouterait à cette fuite vers d’autres marchés, un problème de rendement des parcelles existante, ainsi qu’une perte de surface productive. De 120 hectares, Moorea serait passé à 90 ha. Le Service du développement rural est actuellement en phase de contrôle pour le confirmer.
“Les planteurs ont vu les gros investissements qui ont été faits à l’usine pour le bien de la filière”, précise Jean-Michel Monot. “Pourtant, on a le sentiment que nous n’avons plus le retour sur investissement. Or, la Copam est actionnaire, et JFM Rotui, c’est une usine qui vaut un milliard aujourd’hui, qui regroupe une cinquantaine d’employés..”
Selon la direction de JFM, les pertes engendrées par cette rupture de livraison lui aurait fait perdre l’équivalent de 15 millions de francs. “C’est une économie fragile, si l’on n’y prend par garde, ces pertes pourraient à terme, prendre des proportions inquiétantes. Or tout cela tient à une décision de la coopérative, “servir en priorité l’Usine”, pour ses besoins qui sont impératifs.”
Il n’a échappé à personne non plus que l’augmentation des terres cultivables devient une réelle nécessité pour répondre à la demande locale, usine et marché du frais et chez les professionnels, on ne comprend pas la filière ananas ne bénéficie pas d’un support du Pays comme il en existe pour le secteur de la vanille ou de la perle.
“L’usine ne baissera pas les bras et compte aller jusqu’au bout de ses projets, à commencer par la filière bio engagée il y a quelques années en partenariat avec le SDR.”
Le projet se veut en premier lieu expérimental, mais est voué à se tourner vers la production à grande échelle. “Nous demanderons aux planteurs les plus sérieux de prendre la relève de cette filière bio et raisonnée.”
Je rejoins ce qu'écrit SIRE sur ce sujet !